Seule l’action éduque la classe exploitée, seule elle lui donne la mesure de ses forces, élargit son horizon, accroît ses capacités, éclaire son intelligence et trempe sa volonté.
— Lénine
Le gouvernement conservateur de l’Ontario a approuvé la création d’une université privée à but lucratif exploitée par Global University Systems et offrant des diplômes de maîtrise et de baccalauréat. C’est ce même gouvernement qui a mis au rebut trois campus universitaires publics prévus à Brampton, Milton et Markham, et qui a saboté l’ouverture de l’Université de l’Ontario français. Ce gouvernement a arrêté tous les plans d’expansion du système public d’enseignement postsecondaire et menace maintenant le système public avec l’introduction d’une université privée à but lucratif.
L’annonce de la création d’une université privée à Niagara Falls, en Ontario, constitue une attaque massive contre la prestation publique des services sociaux, les droits démocratiques et le droit universel à l’éducation. En 1976, le gouvernement fédéral a signé le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels des Nations Unies. En signant le Pacte, l’État a approuvé l’article 13, qui reconnaît « le droit de toute personne à l’éducation ». La clause 2(c), stipule que « l’enseignement supérieur doit être rendu accessible à tous en pleine égalité, en fonction des capacités de chacun, par tous les moyens appropriés et notamment par l’instauration progressive de la gratuité ».
Au lieu de « l’instauration progressive de la gratuité de l’enseignement », on a assisté à un désinvestissement massif, qui a rendu l’éducation inaccessible à un trop grand nombre. Les partenariats entre entreprises et institutions publiques étouffent manifestement la liberté académique et la démocratie. Il est pratiquement impossible pour les étudiant-es de la classe ouvrière de quitter l’école sans être lourdement endetté-es, la dette moyenne s’élevant à 28 000 $ pour un diplôme de premier cycle. Le montant total des prêts étudiants dus au gouvernement fédéral atteindra 22,3 milliards de dollars en 2020. Les étudiant-es issu-es de l’international font face à des frais de scolarité trois à cinq fois plus élevés que les résident-es et sont utilisés pour compenser les réductions de financement, les étudiant-es étranger-ères payant environ 40 % des frais de scolarité dans les universités canadiennes. Les profits records de plus de 7 milliards de dollars réalisés par les universités canadiennes en 2021 l’ont été sur le dos de la subsistance des travailleur-ses : les salaires du personnel non enseignant ont diminué de 1,6 %, contre une baisse de 0,2 % pour les salaires du personnel académique, les licenciements massifs ou le non-renouvellement des contrats du personnel non académique ayant permis aux profits de monter en flèche. Nous assistons au début d’une restructuration de l’enseignement supérieur pour mieux servir la classe dirigeante. Nous devons porter une politique de lutte des classes et d’unité avec les travailleur-ses au sein du mouvement étudiant afin de renverser la vapeur.
La classe capitaliste, à l’offensive à l’échelle mondiale, a décidé qu’elle n’était plus disposée à payer pour l’éducation publique au Canada. Le financement public de l’éducation postsecondaire au Canada a été réduit de 80 % il y a 30 ans à moins de 50 % aujourd’hui. Le financement public de l’éducation postsecondaire a stagné ou diminué pendant plus d’une décennie, malgré une inflation galopante. De 2008 à 2020, les inscriptions étudiantes ont augmenté de plus de 20 % et les revenus provenant des frais de scolarité ont augmenté de près de 70 % au Canada. Les grandes entreprises, qui dictent la plupart des politiques gouvernementales, ont clairement fait savoir qu’elles ne se souciaient pas d’élargir l’accès à une éducation de qualité au Canada. Les capitalistes exercent de fortes pressions pour limiter l’accès et prendre le contrôle direct des universités et des collèges.
La restructuration de l’Université Laurentienne, qui s’est détournée de son engagement triculturel à servir la communauté pour devenir un établissement professionnel au service des monopoles miniers ; les changements radicaux apportés au secteur collégial, qui dépend maintenant de personnel enseignant précaire à temps partiel et contractuel ; l’enseignement à but lucratif non réglementé et exploiteur, qui s’adresse principalement aux étudiant-es étranger-ères ou aux personnes appauvries ; la corporatisation de l’administration de l’éducation postsecondaire et l’augmentation embarrassante de la rémunération des administrateurs ; l’introduction du financement fondé sur le rendement dans certaines provinces — ce sont tous des symptômes d’un système public d’éducation postsecondaire à l’agonie au Canada. Nous ne pouvons pas tomber dans les pièges cyniques de la bourgeoisie — l’argument selon lequel l’éducation libérale est un luxe, que les programmes d’études doivent être choisis selon « l’employabilité » ou que l’éducation gratuite subventionnerait les riches en taxant les travailleurs. Notre rôle en tant que jeunes communistes est de construire l’unité dans l’action, de promouvoir la perspective de lutte des classes et d’essayer de s’éloigner des impasses aventuristes ou réformistes. Seul le socialisme offrira une véritable éducation démocratique et émancipatrice. Cependant, en attendant, nous devons nous battre bec et ongles pour empêcher le démantèlement des acquis de l’après-guerre et le retrait de l’enseignement supérieur des mains du public. L’éducation est un droit, mais la seule façon pour les jeunes et les étudiant-es d’avoir ce droit est de se lever et de se battre pour le défendre.